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2007 sans Sarkozy
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20 septembre 2006

Laurent Fabius est-il un imbécile?

Je n’ai pas encore parlé des prétendants à la candidature socialiste. Comme je l’ai déjà dit, je suis adhérent du PS, et bientôt j’aurais un choix à faire que je n’ai pas encore fait. Néanmoins j’ai déjà choisi pour qui je ne voterai pas, et je vais essayer de dire pourquoi.

fabius_21_01_05Ainsi, je ne voterai pas pour la candidature de Laurent Fabius. Et ce essentiellement pour une raison : il ne sera pas capable de gagner l’élection présidentielle. Néanmoins, je ne pense pas qu’il s’en sortirait plus mal que ses concurrents socialistes s’il devait accéder à la fonction suprême. Il a déjà exercé de hautes responsabilités, il connaît bien les rouages du système, peut-être trop. Il ferait sûrement une meilleure campagne que Lionel Jospin en 2002, mais faire pire, il est vrai, ce n’est pas facile. Fabius a quand même une certaine facilité pour parler en public, il fait partie des gens, comme François Hollande, qui s’en tirent mieux en meeting qu’à la télévision. Alors donc, pourquoi lui prédire aussi assurément une défaite ? à cause de ce que j’appellerais son impopularité organique.

Fabius traîne toujours dans l’opinion populaire l’affaire du sang contaminé, alors qu’il y a eu un non lieu. Mais on ne lâche pas comme ça un « responsable politique trempé dans des magouilles », même si il n’y a jamais trempé ! En même temps on lui a fait payer son retour à la rigueur des années 83-85. lI y a fort à parier qu’un premier ministre qui aurait fait baisser le chômage, augmenter le pouvoir d’achat et donner des congés supplémentaires n’aurait pas subi de telles foudres si jamais il y avait eu soupçon pour une affaire du même type que celle du sang contaminé.

Ce qui n’a pas redoré le blason de Fabius, même auprès de ceux qui n’ignorent pas son l’innocence dans l’affaire sus-citée, c’est son ancrage à droite du parti socialiste auquel il nous a habitué jusqu’en 2005. Ce qui en a fait la bête noire de l’extrême gauche, mais aussi de la l’aile gauche du parti.

Enfin, pour achever son déficit de notoriété, le revirement récent très « à gauche » de Fabius est perçu comme une posture opportuniste, et par la même bien peu crédible.

Sur ce dernier point cependant, il serait bon de s’attarder. Pourquoi en politique, plus qu’en tout autre domaine, changer d’avis est-il préjudiciable ? Je ne parle pas des brusques revirements pendant une législature (comme les 70% de GDF au public, par exemple), mais des évolutions notoires de ses convictions, lorsque la société et l’Histoire elles-mêmes montrent de réelles mutations. Combien de fois n’a –t- on entendu dans des micros trottoirs, ou pendant les repas familiaux, vanter une Arlette Laguiller ou un Le Pen, car au moins, eux, ils sont fidèles à leurs convictions (et qu’importe l’irrecevabilité de ces convictions) ! Ces personnes ne sont nullement effrayées de voir ces représentants politiques asséner les mêmes recettes depuis des décennies. Quelle drôle d’idée ne trouvez vous pas ?

Pis. Reconnaître ses erreurs d’appréciations en politique, ou reconnaître simplement que son opinion a changé est tout simplement suspect. Tant d’honnêteté n’est pas possible. Et comment pourrait-on être honnête, ma foi, lorsque l’on change ainsi de conviction ? C’est le serpent qui se mord la queue.

Il y en a pourtant un qui a bien su jongler avec de multiples revirements, c’est notre Président de la République. Nul doute que sur certains points, d’ailleurs, il a réellement changé d’avis. Je veux dire, profondément. Mais jamais il ne l’a avoué. Comme si l’aveu mettait plus en exergue la versatilité que le camouflage – souvent agrémenté d’un aplomb culotté. Chirac a même réussi à faire de ses contradictions sa marque de fabrique.

Chirac est bien français au fond. Car les électeurs français qui, visiblement, acceptent assez peu que leurs représentants politiques changent d’avis, sont pourtant champion toute catégorie du retournement de veste. Indécis jusqu’à l’isoloir, renvoyant sans cesse la majorité dans l’opposition, faisant et défaisant les tendances au gré des sondages, redonnant la majorité à De Gaulle 1 mois après avoir quasiment fait une révolution, s’abstenant aux législatives de 2002 un mois après s’être mobilisé au second tour des présidentielles pour faire un front républicain, votant non à la constitution après avoir voté oui à Maastricht (moi le premier), adorant ce qu’ils ont brûlé, brûlant ce qu’ils ont adoré, les électeurs français, versatiles à souhait, font de leur devise « seuls les imbéciles ne changent pas d’avis ».

Pour en revenir à Laurent Fabius, il aurait le toupet de leur faire croire qu’il n’est pas un imbécile. Mais ça ne prend pas. C’est peut-être que les Français doivent les aimer un peu cons leurs hommes politiques.

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Commentaires
2
Le problème avec les règles du jeu, c'est qu'elles sont toujours imparfaites. Il est certain qu'il eût mieux valu des primaires comme celles qui se sont déroulées en Italie, mais le paysage politique français n'est pas prêt. <br /> La raison principale vient de cette satanée élection présidentielle au suffrage universel direct, je n'en démord pas. Un parti qui ne se présente pas à ces élections, est un parti qui n'existe pas. Dès lors les "stratégies", ne peuvent être que des stratégies de parti. <br /> Quand au clivage oui/non, à l'intérieur du PS, il n'est, à mon avis, pas le principal sujet. Montebourg et Peillon soutiennent Royal, quelques Jospiniens vont voter Fabius, et beaucoup de nouveau militants qui ont voté non vont voter DSK. Car l'objectif de tous est souvent le même : battre Sarko. <br /> Quant tu parles du déni de ceux qui ne sont pas dans le parti, là encore, c'est la règle du jeu : il fallait adhérer au PS pour avoir son mot à dire. Raison pour laquelle je l'ai fait, comme bien d'autres. Beaucoup d'ailleurs laisseront tomber le militantisme après les élections, il ne faut pas se leurrer.<br /> Quand à savoir s'il faut voter Segolène parce les militants l'ont choisi, libre à toi de voter pour un autre candidat au premier tour... tout depend de ton rapport à la culpabilité du 21 avril ;-)
L
Juste une question destinée aux "militants", neufs ou de longue date, du PS: devant l'enjeu colossal de cette prochaine élection, comment comprendre le choix de déterminer le candidat potentiellement éligible à gauche par le seul débat "interne" et le vote des encartés???? Drôle de stratégie en vérité, ou inconscience masquée sous la noble volonté de démocratie interne, ce choix exclut de facto tous les nombreux élécteurs qui, de gauche, donneront leur voix contre Sarko et Consors : quid de tous ceux qui, sympathisants critiques (mais sachant bien ce qu'il en est d'un jour d'élection décisive) ne sont envisagés que comme des effets secondaires du vote des militants???? Quid de tous ceux qui, par exemple, ont voté non à la constitution européenne sans pour autant voter Besancenot ou Laguiller, et qui espèrent la gauche au pouvoir? En vérité, ce débat se déroule étrangement en un certain déni de ceux qui, eux aussi, joueront de leur jugement et de leur évaluation le jour décisif! Faut-il voter Ségolène parce que (et puisque) la majorité des militants (combien au fait, de militants au PS) aura peut-être choisi la Dame Royale ????
2
Tout à fait d'accord avec toi sur ce point. Lorsque j'ai sorti l'argument Deffere-Mendes dans ma cellule (du parti), on m'a regardé avec de gros yeux. Maintenant je doute que la position anti-libérale fasse le plein au second tour. Et cette fois, il ne suffit pas de passer au second tour, il faut aussi gagner l'élection.<br /> L'election présidentielle au suffrage universel direct fait qu'on ne gagne pas l'élection avec des idées, mais avec l'emballage des idées. Et des fois même avec l'emballage tout seul.
B
Certains partisans de Ségolène Royal caressent, même en public voire en meeting, l’espoir d’in « ticket » présidentiel Royal – DSK. <br /> C’est évidemment une pure chimère puisque rien dans nos institutions ne se prête à cette curieuse combinaison. <br /> Cette fausse bonne idée est très désobligeante pour celui qui se voit attribuer un poste secondaire alors qu’il vise le premier rang. <br /> Elle n’est pas flatteuse non plus pour celle qui est censée conduire l’attelage en ceci qu’elle suppose qu’on lui reconnaît d’emblée un déficit de compétences et de capacités que le second terme du binôme a pour tâche de compenser. <br /> La dernière tentative en ce genre où il s’agissait encore d’étayer une modernité supposée par une compétence avérée, le tandem Defferre – Mendès France, a laissé un souvenir cuisant à tous les socialistes qui ont de la mémoire ou connaissent l’Histoire : élimination du second tour avec environ 5 % des voix ! <br /> Le plus sage est donc de choisir d’emblée un candidat qui n’a pas besoin de béquilles et qui a fait la preuve de sa capacité à gouverner même dans la tourmente. Il n’est pas mauvais non plus que ce candidat incarne la ligne anti-libérale qui a eu les faveurs électorales des Français par 3 fois depuis 2002.
B
Kat a raison : c'est en novembre qu'il faut prendre une assurance anti-Sarko ! Et pour cela, il faut choisir le seul candidat crédible qui est résolument antilibéral. <br /> Son "apopularité" prétendue : qui l'organise ? <br /> Il a changé… <br /> S’opposer aux propositions de Laurent Fabius sur la revalorisation du SMIC ou des petites retraites, sur la sécurisation des parcours professionnels, la formation, l’écologie sociale, le logement ou la laïcité est devenu compliqué voire impossible, tant il est clair qu’elles correspondent aux attentes des Français. Je ne parle même pas du référendum sur la Constitution européenne où les Français ont approuvé ses thèses à près de 55 % et le chiffre est encore supérieur dans les couches populaires (près de 80 %). <br /> Des médias autoproclamés de gauche et des responsables politiques –ce ne sont pas tous des hommes- dont on aimerait croire qu’ils sont désintéressés croient avoir trouvé la parade : à défaut d’attaquer les idées, déconsidérer l’homme. <br /> On voudrait nous faire croire que les prises de position de Laurent Fabius sont purement tactiques : il aurait changé de discours mais ne serait pas sincère ! Nos soi-disant intellectuels ne répugnent pas à la psychologie de bazar… <br /> Ceux qui regardent, écoutent et lisent Laurent Fabius depuis des années (ce n’est pas grâce aux médias précités, c’est vrai), ont pu suivre l’évolution de sa pensée et savent qu’il n’en est rien. La nécessité d’une « opposition frontale » a été affirmée dès le Congrès de Dijon en mai 2003. La décision de s’opposer au projet de traité constitutionnel a été annoncée à un moment où les sondages estimaient que le « non » ferait 35 %. <br /> Au demeurant, « il n’y a que les imbéciles qui ne changent pas d’avis », c’est la sagesse populaire qui nous le dit. J’y ajouterais volontiers les orgueilleux et les vaniteux car l’orgueil quand il se confond avec l’entêtement et la vanité mal placée sont des formes « d’imbécillité ». <br /> Devant ses amis réunis à Créteil, le 12 mars dernier, Laurent Fabius s’est exprimé sur ce thème du changement avec sa rigueur et son honnêteté intellectuelles coutumières, le mieux est de lui laisser la parole. <br /> " J’entends dire : « Fabius a changé ». Ce qui évite d’ailleurs souvent de répondre sur le fond à mes propositions. Il est exact que j’ai analysé - et je ne suis pas le seul ! - les changements du capitalisme et ceux de l’Europe libérale actuelle, ainsi que leur impact pour la France. Il est également exact que je connais de longue date, peut être mieux que d’autres, les milieux économiques et que je ne crains pas là aussi de tirer les leçons de l’expérience. Dans mes responsabilités, j’ai été confronté aux phases de croissance et aux phases de crise, j’ai connu successivement une Europe qui produisait de l’avenir et une Europe qui bute sur l’impuissance. J’ai mesuré l’impact et les formes de la mondialisation, j’ai accompagné la gauche dans ses succès et ses échecs. Des uns comme des autres, y compris bien sûr pendant le gouvernement de Lionel Jospin, je prends ma part. Et c’est à la lumière de tout cela que je dis que nous devons modifier certains choix du passé pour mieux faire face aux défis de l’avenir. Croyez-moi, si nous sommes clairs sur les objectifs, sur les moyens réalistes pour les mettre en œuvre, nous ne serons pas seuls ! Il n’y a pas que la liberté qui soit contagieuse, la solidarité l’est aussi.<br /> Au cours des années, j’ai pris des positions qui au début sont parfois apparues minoritaires au sein des instances du PS - par exemple en faveur de la social-écologie, pour la loi sur les signes religieux à l’école, contre les délocalisations, pour réorienter l’Europe, ou tout dernièrement pour refuser qu’on puisse se dire socialiste et traiter de sous-hommes d’autres hommes -, ensuite ces positions se sont souvent imposées. Si j’ai fait ces choix, c’est que ce qui compte ce n’est pas de suivre les modes - qui varient souvent et que les urnes finissent pas contredire - mais d’avoir le courage de ses convictions et la volonté qu’exige le service de la nation. Je suis membre du Parti Socialiste depuis plus de 30 ans et élu d’une circonscription ouvrière depuis plus de 20. Parce que l’avenir vient de loin, j’entends comme chacun ici être fidèle à l’histoire du socialisme français et à ceux qui l’ont incarné. Jaurès, ou la synthèse entre le socialisme et la République. Blum et l’exigence morale. Mendès et le besoin de vérité. François Mitterrand, dont nous n’avons pas attendu le 10ème anniversaire de sa disparition pour nous reconnaître dans ses combats : chercher à rassembler les socialistes sur une ligne juste, puis toute la gauche, puis une majorité des Français pour inscrire notre action de changement dans la durée. Le contexte, mondial, européen, français, a changé et j’en tiens compte, mais ces exigences là n’ont pas changé.<br /> Car, à l’heure des choix, les électeurs iront au fond des choses. Ils voudront savoir ce que notre politique peut changer concrètement et quelles sont les valeurs qui l’animent. J’ai des convictions, je formule des propositions : je veux les faire partager. C’est le sens de mon engagement pour les échéances qui viennent." <br /> Ce thème a également été abordé au cours du dernier "Rendez-vous RTL / Le Monde" avec Laurent Fabius, vous pouvez le retrouver sur son site : "www.Laurent-Fabius.net" <br /> En 2007, nous le savons tous, notre pays sera dans une situation très difficile. Ce dont la France aura alors besoin à sa tête, c’est d’une vision claire de son avenir, d’une grande compétence économique et politique, d’une expérience internationale, d’une véritable capacité de dialogue républicain et social, d'une conviction laïque inébranlable et d'une orientation antilibérale claire. Combien à gauche, en dehors de Laurent Fabius, peuvent se prévaloir de ces qualités ? C’est la seule question qui vaille. Les socialistes puis les Français devront y répondre.
2007 sans Sarkozy
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