Indécis, abstention danger!
Ça y est. La campagne officielle vient de commencer. Et il reste, paraît-il, 42% d'indécis.
Et combien parmi ces indécis, d'abstentionnistes?
Il y a plusieurs catégories d'abstentionnistes. Il y a tout d'abord ceux qui ne sont pas inscrits sur les listes électorales. Ces « exclus »du vote le sont soit par flemme, soit par désintérêt totale de la chose politique, soit parce que, en gros, « les politiques sont tous des pourris, que ce soit X ou Y, c'est toujours la même chose ».
On retrouve bien évidemment ce genre de discours chez des abstentionnistes inscrits.
Il faut se rendre à l'évidence, il y a une frange de la population qui ne votera jamais, pour qui la politique ne peut pas changer la vie. En quelque sorte c'est une abstention de résignation.
Ensuite il y a les abstentionnistes qui s'intéressent, de près ou de loin, à la politique mais qui, malgré l'éventail de candidatures qui se présentent devant eux, ne trouve aucun candidat à son goût. Tels la midinette, la femme ou l'homme recherchant son prince charmant – ou la femme idéale – ils répugnent à donner leur voix à un candidat qui ne corresponde pas exactement à leurs opinions. Il y a, dans cette posture, comme une volonté fusionnelle entre cette partie de l'électorat vers les candidats qui se présentent, volonté forcément frustrée. On n'a jamais appris, par exemple, à ces gens, que « choisir, c'est renoncer », et que, éventuellement, apporter un suffrage, n'est pas donner une bénédiction. Il s'agit là, en réalité, d'une vision un peu romantique de ce que peut être une élection – ne parle-t-on pas, en effet, dans quelques histoires à l'eau de rose, de « l'élu de son coeur »?
Enfin, est né il y a de ça quelques années, une nouvelle catégorie d'abstentionnistes. Ce sont ceux qui sont très au courant de la vie politique française, voire internationale, qui ont, la plupart du temps, déjà voté plusieurs fois, et qui, un peu guidés par la même foi que ceux sus cités, refusent de voter pour un candidat, parce que là, tu vois là, il ou elle a dit un truc qui ne me plaît pas. Ou bien, les propositions sont trop tièdes. Ou bien, si ça avait été un autre candidat du même parti j'y serais allé, mais là non, je ne peux pas. À l'inverse de la catégorie différente, ces abstentionnistes là ne réclame pas un corps à corps fusionnel, mais réponde, en réalité, à des principes plus ésotériques que pragmatiques.
Il est vrai que ces abstentionnistes sont plutôt de gauche, et, même s'ils ne le sont pas, se révèlent très souvent être de farouches anti-sarkozistes.
Ainsi des français qui considèrent Sarkozy comme un vrai danger, voire certains comme un facho, mais qui, de toutes les manières, ne veulent pas aller voter pour Ségolène Royal ou François Bayrou. Non mais franchement, le coup du drapeau. Et il va gouverner avec qui l'autre? De toute façon il est de droite.
Et les petits candidats, de toute façon, ça sert à quoi, hein? Ils ne seront jamais élus.
Mais si c'est Sarko, je me casse, sérieux.
Il y a beaucoup d'orgueil, en réalité, dans ce genre d'attitude. Avec tout ce que ça comporte d'ambiguïté. C'est à la fois ne pas vouloir donner SA voix, presque son sang, à quelqu'un qui ne le mérite pas, et en même temps croire que sa voix, en fin de compte, ne changera rien. Et que, justement, comme ça ne changerait rien, ça ne vaut pas la peine.
Car les choses ne valent que si je peux changer les choses, n'est-ce pas?
« - Mais alors pourquoi se casser si Sarkozy passe?
- Parce que je ne pourrais plus rien changer. »
Qu'on se le tienne pour dit : chaque voix compte. S'il existe un réel danger alors il est de la responsabilité de tous les électeurs de faire en sorte que les français ne le vivent pas. Ça ne veut pas dire qu'ils vont vivre mieux dans un monde de bisounours et de Casimir, ça veut juste dire que le danger sera évité.
« - Ah oui, mais j'en ai marre de voter contre.
Ça vaut toujours mieux que ne pas pouvoir voter du tout. »